Cette année marque le retour du producteur français de musique électronique Oxia avec la sortie très attendue de son deuxième album intitulé ‘Tides Of Mind’ chez InFiné. Huit ans après son premier album ’24 Heures’, Olivier Raymond démontre tout l’étendu de son talent avec ce nouvel opus sur lequel il ose s’aventurer sur des terrains plus pop que par le passé. Nous avons pu le rencontrer, détendu et souriant, au lendemain d’une soirée au Ritz durant laquelle il jouait. L’occasion d’en savoir plus sur cet acteur majeur de la scène électronique.


Bonjour Olivier, peux-tu faire une brève présentation de toi à nos lecteurs, ton parcours, comment tu as commencé à mixer, à produire ?

J’ai commencé par de la radio, il y a quinze ans, j’avais une émission de funk. Puis j’ai commencé à faire des soirées, à être résident dans des clubs. Ensuite je me suis acheté du matériel au début des années 90 pour faire de la musique, à peu près en même temps que le moment où la techno est arrivée en France. On a monté un premier live sous le nom d’Oxia, à la base c’était un duo. Le premier disque est sorti en 1995, ça remonte un peu. Finalement mon collaborateur Stéphane Deschezeaux a quitté le projet et j’ai repris le nom Oxia en solo avec lequel je joue depuis le début des années 2000.

Est-ce par choix que tu as attendu huit ans pour sortir ton deuxième album ?

Non, en fait, une fois que j’ai sorti mon premier album (« 24 Heures » en 2004) derrière je me suis dit, j’ai un peu de temps. Finalement les mois, les années commencent à passer. Au bout de deux ans je me suis dit, bon, il faudrait que je m’y remette. Mais entre-temps j’ai eu pas mal de projets, j’ai fait pas mal de remixes, de maxis. Et puis en fait on en parlait assez avec Agoria, car on est assez proches… Du coup, il m’a proposé de le sortir sur InFiné. A ce moment là ça me donnait une raison de plus de le faire, InFiné ça correspondait bien à ce que je voulais à ce moment là. Je n’avais pas envie de faire un album seulement dancefloor, j’avais envie de faire d’autres choses, inviter des chanteurs et chanteuses notamment.

Quelle est ta relation avec ce label, avec Agoria, même s’il a prit ses distances ?

A la base, c’est vrai qu’on s’est rencontrés il y a très longtemps, au début de la scène Rhône Alpine puisqu’il est de Lyon et moi de Grenoble. On se voyait régulièrement lors de soirée et petit à petit on a fait connaissance. J’avais un peu de mal au début, mais on a appris à se connaître. C’est lorsque je suis venu habiter à Lyon pendant deux ans qu’on est vraiment devenus proches.

Pourquoi avoir choisi InFiné plutôt qu’un autre label pour sortir cet album ?

J’ai choisi InFiné d’une part car Agoria me l’avait demandé, puis j’avais envie de faire des choses différentes, donc les labels je sors habituellement mes maxis n’auraient peut-être pas été très adaptés. Quand on voit certains titres sur mon album, c’est complètement différent. Ce que j’aime justement chez InFiné, c’est cette liberté d’esprit, ils peuvent aussi bien sortir un album d’Agoria plus techno mais avec des incursions pop que des titres de Rone, Clara Moto ou alors Francesco Tristano ou Cubenx. C’est vraiment très large.

D’où vient le titre, « Tides Of Mind » ?

Je ne l’ai pas vraiment trouvé tout seul, on était à plusieurs pour trouver le titre, entre le label, mon agent… On est arrivés là-dessus car à la base je voulais un titre qui traduise le fait que mon album parte dans différentes directions mais aussi le fait que la musique influence notre état d’esprit, notre façon d’être.

Dans ta bio on peut lire que tu as écouté beaucoup de musique pendant la composition de cet album, cela se ressent à l’écoute, peux-tu nous ressortir deux-trois artistes ou disques qui t’ont influencé avant ou pendant l’écriture du disque ?

C’est vrai que j’ai écouté pas mal de choses différentes, aussi bien des artistes comme Radiohead, que des choses plus électroniques. J’écoute pas mal de jazz aussi depuis longtemps notamment des vieux classiques comme Ella Fitzgerald ou Billie Holiday, et dernièrement je me suis mis à écouter Miles Davis ou Herbie Hancock.

« J’ai toujours essayé de donner du groove dans mes morceaux, ça a toujours été quelque chose d’important pour moi. »

De quels artistes de la scène française et internationale te sens-tu proche aujourd’hui ?

J’aime beaucoup la nouvelle scène américaine avec notamment Seth Troxler, Art Department, les gens du label Crosstown Rebels, mais aussi Mathias Kaden ou Deetron. En France, Agoria évidemment, jsuis vraiment touché par ce qu’il fait. Shonky et D’julz sont des artistes que j’apprécie également.

C’est quoi le groove pour toi ?

C’est marrant que tu me poses cette question car on en parle souvent avec The Hacker, car parfois les gens vont te trouver un moment qui groove et toi non. C’est quelque chose d’assez difficile à expliquer avec des mots, il faut le ressentir, chacun le ressent différemment. J’ai toujours essayé de donner du groove dans mes morceaux, ça a toujours été quelque chose d’important pour moi.

Concernant les invités sur cet album, pourquoi avoir fait appel à Miss Kittin, Scalde ou Mesparrow ?

Miss Kittin elle vient de Grenoble, donc ça fait une quinzaine d’année qu’on se connaît. En fait c’est l’été dernier, lorsqu’on était à Ibiza, qu’on s’est rendu compte que finalement on n’avait jamais rien fait ensemble, c’est là que je lui ai proposé de chanter sur mon album. La collaboration s’est faite très naturellement. Concernant Mesparrow, j’avais déjà fait le morceau, mais il me manquait une voix, du coup je cherchais un vrai chanteur, une chanteuse en l’occurrence. Agoria a rencontré Mesparrow par hasard pendant un festival et il m’a dit que c’était vraiment bien ce qu’elle faisait et que ça pourrait me plaire. Finalement j’ai écouté et pris son contact immédiatement. J’aime beaucoup ce type de voix qui se situe à la fois entre le jazz et la pop. Enfin, pour Scalde, on avait bossé sur un track qui s’appelait « Dust » avec Agoria. J’avais vraiment beaucoup accroché sur sa voix, son univers, on s’était dit que ce serait bien que je l’invite sur mon album.

Il y a une bonne part d’improvisation sur ton disque, tu as notamment invité le pianiste Richard Gow…

Oui en fait c’est un anglais qui habite dans le sud, à Cannes. Il avait déjà fait un truc avec Nicolas Masseyeff. Ils sont amis depuis très longtemps. Et comme Nicolas a travaillé avec moi sur le mix de l’album, il y avait ce morceau à la fin qui partait un peu jazzy sur la fin. Je voulais un vrai pianiste pour donner la petite touche d’improvisation sur la fin.

Dans quelles conditions as-tu composé cet album, avec du matériel analogique ou numérique ?

Il y a un peu d’analogique sur quelques titres, mais la plupart des morceaux ont été composés en numérique.

« J’avais vraiment envie de montrer que je suis capable de faire autre chose. Par exemple, le titre avec Mesparrow c’est carrément un exercice de style pour moi, c’est nouveau. »

Dans quelle configuration joueras-tu en live ?

Je suis en train d’y réfléchir en ce moment, ce ne sera pas une grosse configuration. Il y aura un ordinateur avec Ableton, un clavier et un contrôleur avec des pads pour me donner un peu de liberté pendant mes lives. J’aimerais faire un live qui soit dans le même esprit que celui de Rodriguez Jr, qui permette de garder une certaine liberté de création. Il faut que je trouve une façon de faire mon live où je ne m’ennuie pas. Je vais également continuer à faire des DJ set, le live sera réservé pour quelques clubs et les festivals.

Sur la plupart de tes compositions, les mélodies sont omniprésentes, souvent contemplatives et mélancoliques, comment expliques-tu cela ?

C’est quelque chose auquel je ne réfléchi pas vraiment. En l’occurrence, sur cet album j’avais vraiment envie qu’il y ait ce côté groove sur les rythmiques, mais il fallait que ce soit plus mélodique que ce que je fais habituellement sur mes maxis. Je ne voulais pas faire des tracks exclusivement dancefloor sur cet album.

C’est vrai qu’on peut très bien écouter ton album dans son salon…

Oui, c’est justement là où je suis content car j’ai réussi à mélanger la musique que j’écoute dans mon album. C’est ce que j’écoute qui m’a influencé aussi je pense. J’avais vraiment envie de montrer que je suis capable de faire autre chose. Par exemple, le titre avec Mesparrow c’est carrément un exercice de style pour moi, c’est nouveau.

Toi qui fait figure d’ancien des musiques électroniques en France, comment trouves-tu que la techno à évolué ces 10-15 dernières années ?

La France est plutôt bien placée sur le plan international en musique électroniques, quelque soit les styles. Même si ce n’est pas trop mon truc, toute la scène Ed Banger, ils sont là depuis presque dix ans maintenant. Il y a quand même pas mal de nouveaux, Gesaffelstein par xemple. Après, on a les anciens comme Laurent Garnier ou Agoria qui sont là. On a également une bonne scène house avec Shonky ou Rodriguez Jr.

Les gens qui vont télécharger ton album illégalement, ça te fait quoi ?

Je pense que maintenant il faut accepter le fait que c’est inévitable, qu’on ne peut rien faire contre ça. Après on peut se demander si ces gens là auraient acheté mon disque sans le téléchargement ? Là, du coup, ils téléchargent mon disque, donc quelque part ça me donne une image et un peu de notoriété. Ca veut dire qu’ils seront peut-être là le jour où je jouerais dans leur ville. Quand tu fais un album comme ça, tu as envie qu’il soit diffusé, donc quelque part c’est bien pour moi, après il y a eu du travail, des gens qui ont investi de leur temps et leur argent dedans…

Sortie de l’album Tides Of Mind le 23 avril chez InFiné. Oxia jouera pour la première fois son album en live lors de la release party au Rex Club (Paris) le vendredi 25 mai.

Le Soundcloud d’Oxia

Le site officiel du label InFiné